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Histoire du tribunal

Histoire et architecture du tribunal

Les tribunaux administratifs français ont été créés par un décret du 30 septembre 1953 portant réforme du contentieux administratif, remplaçant ainsi les anciens Conseils de préfecture. A Strasbourg, cependant, c'est dès le 26 novembre 1919 que fut fondé le tribunal administratif d'Alsace-Lorraine qui conserva son nom jusqu'en 1953, date à laquelle il devint tribunal administratif de Strasbourg.

En effet, les Conseils de préfecture faisaient, dès avant la Première Guerre mondiale, l'objet de vives critiques. En 1919, l'opportunité d'une véritable juridiction administrative fut saisie à Strasbourg, expérience destinée à se démarquer aussi bien du système existant en "France de l'intérieur" que de celui mis en place entre 1871 et 1919. C'est ainsi que le 26 novembre 1919, le Président de la République, Raymond Poincaré, et le Président du Conseil, Georges Clémenceau, contresignaient en application de la loi du 17 octobre 1919 et sur la proposition du Commissaire général de la République à Strasbourg, Alexandre Millerand, un décret relatif au régime transitoire de la juridiction administrative en Alsace - Lorraine.

Alors que les Conseils de préfecture occupaient des fonctionnaires du Ministère de l'Intérieur, un recrutement sur concours spécifique fut institué par décret du 27 août 1926 et organisé exclusivement pour les futurs magistrats du Tribunal administratif d'Alsace-Lorraine. En outre, la présidence du Tribunal administratif n'était pas assurée par le préfet mais par Henri Eschbach, notaire de son état, nommé en janvier 1920, qui restera président du tribunal jusqu'en 1953. Les autres membres, au nombre de cinq à l'origine, exerçaient de manière indépendante, leur fonction devenant notamment incompatible de tout autre emploi public ou privé.

Les compétences de ce tribunal, outre celles dévolues aux Conseils de préfecture, reprenaient celles de ses prédécesseurs de l'époque allemande, à savoir un conseil de district par département et un conseil impérial siégeant à Strasbourg faisant office de cour d'appel. La procédure locale en usage devant les conseils de district et le conseil impérial était maintenue en application de l'article 1er du décret du 26 novembre 1919. Toutefois, la procédure de droit général utilisée devant les conseils de préfecture trouvait application dans certaines matières (élections des conseillers d'arrondissement, conseillers municipaux, maires et adjoints; contraventions de grande voirie; litiges concernant les contributions directes afférents aux impôts introduits en Alsace-Moselle depuis la création du tribunal administratif).

Durant la seconde guerre mondiale, le Tribunal administratif d'Alsace et de Lorraine est transféré à Grenoble comme la plupart des autres administrations françaises installées à Strasbourg. L'ensemble des textes applicables à la date du 1er septembre 1939 est remis en vigueur par l' ordonnance du 15 septembre 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. Le Tribunal s'en retourne donc à Strasbourg.

Le décret du 30 septembre 1953 portant réforme du contentieux administratif a fait du "Tribunal d'Alsace et de Lorraine" un juge de droit commun en premier ressort du contentieux administratif en lui donnant également le titre de tribunal administratif de Strasbourg. Il conserve néanmoins certaines particularités dont la plus notoire est certainement de trancher les litiges de droit local alsacien-mosellan demeuré en vigueur (droit local du culte, des professions...). Telle est l'histoire, trop rapidement évoquée, du tribunal administratif de Strasbourg.

Le Tribunal administratif et la Villa Adler

Construite entre 1910 et 1912 par l’architecte strasbourgeois Eugène Haug, la villa sise 31 avenue  de  la  Paix,  qui  abrite  aujourd’hui  le  tribunal  administratif  de  Strasbourg,  était  destinée originellement à accueillir la famille d’un industriel appartenant à la bourgeoisie juive venue de l’Allemagne rhénane : Otto Adler.
En 1878, son père, Isaac Adler, et Ferdinand Oppenheimer, le beau‐frère de ce dernier, ont fondé ce qui deviendra une des plus grandes tanneries d’Europe à l’époque, avec plus de 1 135 ouvriers en 1908.  
D’inspiration progressiste, les familles Adler et Oppenheimer ont œuvré au bien‐être des ouvriers de leur usine située à Lingolsheim : maisons ouvrières à loyer modéré, salle des fêtes  avec  installations  sanitaires  (bains  et  douches),  école  maternelle,  ou  encore  coopérative avec produits alimentaires à bas prix.  
Ils  étaient  également  de  grands  donateurs au  profit  entre  autres  de  la  synagogue  de  Strasbourg, de l’église catholique de Lingolsheim et de l’orphelinat israélite d’Haguenau.
 
Otto  Adler  et  son  épouse  n’auront  vraisemblablement  partagé  avec  leurs  deux  enfants  cette  vaste  maison  de  900  mètres  carré  que  pendant  une  courte  période,  avant  d’être expulsés  en  raison  de  leur  nationalité  allemande  en  1920  par  les  autorités  françaises,  malgré les protestations des élus et de la population locale.  
A partir de 1923, une compagnie d’assurance, « Comptoir d’assurances alsacien et lorrain » a  racheté  le  domaine  et  en  a  fait  son  siège  administratif,  mettant  ainsi  à  profit  les  nombreux  espaces  de  représentation  intérieurs.  Par  la  suite,  la  villa  a  été  vendue  à  la Région Alsace en 1984.  
Cette même année, le tribunal administratif de Strasbourg s’installe dans la « villa Adler », sur l’un des axes majeurs de la Neustadt de Strasbourg, classée récemment au patrimoine mondial de l’Unesco.   
Ouverte  au  public  lorsque  le  tribunal  tient  séance,  la  salle  d’audience  occupe  l’ancien  séjour  et  salle  à  manger  de  la  famille  Adler  et  laisse  découvrir  un  plafond  en  staff  très ouvragé. Un monumental escalier intérieur relie le rez‐de‐chaussée aux étages supérieurs.  

> Consulter quelques photographies des lieux (pdf)

Sources :  
‐ Revue d’Alsace, N°136, pages 180 à 190, 2010.  
‐ Rapport de stage « La Neustadt de Strasbourg, valorisation et médiation », par Rémi Kick, Université de Strasbourg, faculté des sciences historiques (2014‐2015).
‐ « Strasbourg : La construction moderne illustrée », de Eugène Haug (1932).

 

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